mercredi 7 septembre 2016

Merci pour ce moment, Robert !




       Après un été caniculaire, la rentrée s’impose benoîtement avec son lot de chiards qui gueulent leurs mères et ces files de travailleurs qui sont déjà en surrégime. Mais cela ne suffit pas à notre bonheur. Il faut encore que les hommes politiques, de retour de leurs universités d’été où pas une idée nouvelle n’a émergé, fassent leurs rentrées pour nous en mettre plein les mirettes. Le système des primaires nous régale de sa merveilleuse « démocratie » avec ses petites phrases assassines, sa violence mesquine et ses acteurs frelatés. Le chouchou des médias, Emmanuel Macron, en a profité pour faire la nique à son mentor mou et faire mine de se croire un destin providentiel – à moins que l’ancien banquier autoproclamé philosophe n’ait fini par croire dans l’oracle de ses amis marketeurs. Triste spectacle. Heureusement, il y a une lueur dans la nuit artificielle de la rentrée. Elle se nomme Robert, l’homme qui, dans un happening génial ou un moment d’égarement honteux, a foutu en l’air sa belle carrière politique en l’espace de quelques minutes. 



         Qui est cet artiste performer ? Il s’agit de Robert Rochefort, né en 1955, qui avait tout parfaitement combiné jusqu’ici pour se faire sa petite place au soleil de la République. Pensez-y, un diplôme d’études supérieures en poche, le voilà qui intègre le département statistique de la Caisse nationale d’assurance maladie et qui prend rapidement la direction du CREDOC (Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie). Bref, le Robert manie assez bien la sociologie et la statistique pour devenir un consultant réputé dans le paysage audiovisuel français. Il faut dire qu’il y met du sien pour qui se rappelle l’avoir vu pérorer dans C dans l’air, l’émission de débat où les invités sont toujours parfaitement d’accords les uns avec les autres. Il récitait son petit chapelet libéral bon teint avec le ton sentencieux de « ceux qui en sont », les winners de la ploutocratie. On l’avait d’ailleurs repéré le petit Robert et on le récompensait à la mesure de ses « compétences » : membre du Conseil d’analyse économique, membre du conseil d’éthique publicitaire (eh oui !), administrateur de sociétés de droit privé, membre du conseil d’administration de la Croix rouge, etc. Avec un tel pedigree, sa destinée filait comme une étoile : en 2009, il atteint la stratosphère avec son élection à la députation européenne suivie de sa nomination à la vice-présidence du Modem. 



         Quel artiste ! Et pourtant, le mercredi après-midi du 3 septembre, patatras, tout s’écroule. Robert Rochefort est pris « en train de se faire plaisir » – « se masturber » précisera l’AFP – à proximité de deux adolescentes (qui ne le verront pas) au Castorama de Vélizy-Villacoublay. Au stade de l’enquête, personne ne sait encore ce que pouvait bien faire un député européen (à 12 000 euros par mois) dans un magasin de bricolage un mercredi après-midi. Certains avancent qu’il aurait voulu s’immerger dans le quotidien des Français, d’autres, plus prosaïques, y voient le besoin naturel de bricoler, certains enfin, minoritaires, interprètent cette virée à Castorama comme un signe de la providence. Quoiqu’il en soit, tout le monde a désormais cette image en tête : Monsieur le député européen qui se pignole entre deux travées de Castorama – là encore, au stade de l’enquête, personne ne sait précisément quelles sont les travées à mettre en cause : les scies égoïnes, le parquet flottant, les luminaires ovoïdes, les moquettes souples, etc. Mais la petite affaire se termine mal : alerté par un quidam, le vigile chope manu militari notre député en pleine action et appelle la police à la rescousse. 

         N’écoutant que son courage, Robert avoue l’exhibition sexuelle et trouve une parade merveilleuse : en effet, il explique aux policiers « avoir besoin de se masturber » quand il est « en situation de stress ». Je laisse aux lecteurs le soin d’imaginer la vie trépidante de notre député. Ce mercredi noir a, donc, vu un grand homme politique (un véritable humaniste !) se fourvoyer lamentablement dans une de ses petites viles passions dont on espère qu’elles n’avaient pas encore franchi d’autres stades. Rappelons au passage que l’un des slogans de Castorama était : « Faire soi-même, plus vite et moins cher, c’est facile ! » A bon entendeur…

         Depuis, notre député a semble-t-il malheureusement retrouvé ses esprits, a nié tout en bloc et a même laissé sous-entendre qu’il s’agirait d’un coup monté voire d’une agression sur un élu du Parlement européen. Pour parfaire cette nouvelle version des faits, il a pris un talentueux avocat qui s’avère être aussi le défenseur de Denis Baupin. Le mystère reste pourtant entier : que pouvait bien faire un député européen au Castorama de Vélizy-Villacoublay un mercredi après-midi ? 









7 commentaires:

  1. C'est à cause de Laurence Rossignol : le sexisme masculino-genré étant à traquer dans tous les coins et les recoins (par ex dans les blagues sur les blondes) ces hommes muselés en sont réduits à pratiquement se prendre en mains. Mais pas sans stimulus : il faut un signifiant (cass' tor à moa, cri de ralliement scout peut-être, lui seul pourrait le savoir) et surtout, dé-virilisation et honte de soi oblige, pas-vu-pas-pris. Mais où sont nos exhibitionnistes d'antan, qui n'avait pas peur d'impliquer l'autre ?

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    1. Castorama avec trois petits a ?

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    2. Ah Ah Ah magnifique !
      L'oeil serait l'a-objet-partiel, et les filles l'a-utre semblable dans l'espace, qui lui permettent de s'identifier au a-objet-reste qu'il fut dans le désir de l'A-Autre ?
      Peut-être un Autre aveugle dont il fut le "rayon" de soleil, et castorama juste contingent ?

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    3. Peut-être aussi qu'il s'appelait "Castor salace" quand il était scout.

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  2. J'aavais vu passé cette info oui. Mais dites-donc, vous ne mentionnez pas son statut héroïque de Numéro 2 du parti centriste! C'est comme ça que la TSF nous l'a présenté! Et Baillleroux qui a du passer par toutes les couleurs de l'arc-en-ciel avant de lui téléphoner, déconfit, pour le "démissionner". Cordialement, le Nantois.

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  3. Voici en prime le communiqué particulièrement abscon du personnage via son avocat. Il est loin, très loin. https://www.facebook.com/emmanuel.pierratii/posts/1170399899670395

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    1. Perdu pour le parti centriste et la société toute entière. Plus qu'à entamer une carrière de vendeurs de chouchous à poil sur les plages du Cap d'Agde.

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