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On le voit, la dystopie imaginée par
Orwell s’immisce lentement dans nos réalités quotidiennes, avec la bénédiction
des technologies, l’hypocrisie des gouvernants et l’apathie des peuples. La
Chine complète ce dispositif par la mise en place d’un « président de
tout » et d’un « président à vie » qui renoue avec le bel
ordonnancement des régimes totalitaires. Nos médias institutionnels, tout
occupé à dénoncer les frasques sexuelles de Trump et les élans guerriers de
Poutine, s’en alarment à peine. Décidément, Mao aura toujours bonne presse en
France !
Pourtant,
les signaux envoyés par les autorités chinoises ne manquent pas d’inquiéter. Le
nouveau maître, Xi Jinping, s’inscrit dans la lignée des « princes
rouges » et se présente comme l’héritier direct de la révolution
culturelle. La figure de Mao, un temps reléguée au second rang, est de nouveau
célébrée comme une icône révolutionnaire tandis que le parti est remis en ordre
de marche et l’armée purgée de ses éléments réformistes. Placé sous l’égide de
l’instituteur, de l’ouvrier et du soldat, la propagande élève la personnalité
de « tonton Xi » au statut de grand patriarche de la nation, celui
qui embrasse l’histoire millénaire de la Chine et qui incarne à lui seul
l’image du communisme triomphant. Dans ce contexte, les réseaux sociaux
constituent une formidable caisse de résonnance, d’autant plus que les grands
philanthropes américains (Zuckerberg et compagnie) ont accepté sans broncher de
souscrire aux règles de censure établies par le régime.
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Fort
de cette nouvelle doctrine, Xi Jinping a également nommé explicitement ses
ennemis dans un texte qui devait rester confidentiel : le « document
n° 9 » - la journaliste Gao Yu qui en a révélé la teneur a été condamnée à
7 ans de prison. Aucunes traces de repentance dans ce texte ; au
contraire, toute remise en question du passé est dénoncée comme une forme de
« nihilisme historique » directement importé des Etats-Unis. Sur
cette question, Xi Jinping garde un souvenir traumatique de l’écroulement de
l’Union soviétique qui a résulté, selon lui, d’une volonté réformatrice coupable.
Les autres figures de l’ennemi se rattachent toutes à la culture
occidentale : dénonciation de la démocratie libérale, remise en cause des
valeurs dites universelles, encadrement strict de la liberté d’expression,
restrictions des droits civils, etc.
En
contrepartie, il appartient à la Chine de proposer un véritable modèle
alternatif dont on peine à voir les contours si ce n’est dans l’expression de
l’écrivain Murong Xuccun qui parle d’un « nouveau totalitarisme de
marché ». Assurément, il vient de perdre quelques points sur son permis de
citoyenneté…
Superbe blog!
RépondreSupprimerMerci. Ca vous en bouche un coin ?
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