Condamnée,
comme un milliard de personnes dans le monde, à supporter les rigueurs d'un contraignant CDI (Confinement à Durée Indéterminée), l'équipe
d'Idiocratie a décidé de proposer à ses lecteurs quelques pistes
pour se divertir en ces temps difficiles. Voici donc le premier volet
de notre chronique « Cinéma Corona », proposant une
sélection d'oeuvres qui pourront contribuer, chers lecteurs, à vous
changer un peu les idées. Et pour
commencer, nous avons la joie de vous présenter notre première
sélection :
Virus.
(Fukkatsu no hi. Le jour de la résurrection),
de Kinji Fukasaku. 1980. 156 mn
Virus
était
destiné à devenir un succès interplanétaire,
un blockbuster nippon capable de concurrencer ses rivaux hollywoodiens et faire entrer le Japon par la grande porte dans l'univers des films
catastrophe à grand spectacle, qui connaissent un véritable âge
d'or dans les années 1970 et 80 avec des œuvres telles que
L'aventure
du Poséidon (1972,
de Ronald Neame, avec Gene Hackman et Ernest Borgnine), Airport
(1970,
de Georges Seaton, avec Burt Lancaster), La
Tour Infernale (1975,
de John Guillermin, avec Steve McQueen) ou le radioactif The
China Syndrome (1979,
James Bridges, avec l'immortel Jack Lemmon). Virus
s'ancre plutôt dans la tradition des films apocalyptiques, aussi bien
japonais, comme La
submersion du Japon (Nihon
Chinbotsu,
réalisé en 1973 par Shiro Moritani), qu'américains avec The
Andromeda Strain
(1971, de Robert Wise, avec James Olson). En conséquence, Virus
imagine
un scénario dans lequel une horreur bactériologique créée par un
généticien américain, répondant au doux nom de MM88 (le virus, pas le généticien), est libérée
accidentellement lorsque qu'un avion contenant la boîte de Pandore pas si étanche s'écrase dans les
Alpes italiennes. Possédant la terrifiante capacité de démultiplier
la toxicité de n'importe quel virus avec lequel elle entre en
contact, la souche mortelle fait déferler sur le monde une
effroyable pandémie de « grippe italienne » qui
éradique l'humanité toute entière en six mois.
Toute
entière, ou presque, car en Antarctique, un petit village de 863
scientifiques de nationalités diverses survit à la catastrophe,
ainsi que l'équipage d'un sous-marin britannique, le Nereid,
qui
rejoint les survivants après être parvenu à les contacter par
radio. A partir de cette situation de départ, le film développe
quelques questionnements intéressants : celui de la
cohabitation entre les survivants au sein d’un univers clos et
confiné à laquelle s'ajoutent les différences de cultures et de
nationalités qui ne tardent pas à être génératrices de tensions. Ces
tensions sont d’ailleurs largement aggravées par l’inégale
représentation des deux sexes : le groupe de 863 survivants ne
comprenant en effet que… 8 femmes, de difficiles questions morales
ne tardent pas à se poser. Ainsi, il est nécessaire de repenser complètement l’organisation des relations affectives et
sociales ; le problème de la violence et du viol se pose de
manière aiguë au sein de cette communauté isolée du reste du
monde, avant d'être plus ou moins résolue par le choix de la
polygamie, en laissant une relative liberté aux femmes dans le choix
de leurs conjoints et partenaire ; une situation qui n'est pas sans rappeler la
situation dépeinte par Robert Merle dans son roman inspiré de la
mutinerie du HMS
Bounty,
L'île,
publié
en 1962 (bien que dans le roman de Merle, on ne laisse pas le loisir aux polynésiennes de choisir leur compagnon britannique).
Un malheur n'arrivant jamais seul, le groupe des rescapés de l’Antarctique doit faire face
à la menace d’un nouvel holocauste puisqu’un général américain
(une fois de plus...) devenu complètement paranoïaque a activé
avant de mourir les systèmes automatiques de défense atomique des Etats-Unis, qui assument désormais seuls mais avec une
rigueur tout informatique le maintien de l’équilibre de la terreur
et menacent d’utiliser l’arsenal nucléaire de la superpuissance défunte au moindre frémissement de la lithosphère. Virus narre donc l'histoire de ces 863 survivants, confinés en plein milieu de l'Antarctique, vivant sous la constante menace d'un holocauste nucléaire déclenché par des machines bornées, elles-mêmes mises aux commandes de la fin du monde par un Dr. Folamour emporté par la grippe quelques minutes après avoir signé l'arrêt de mort des derniers représentants de l'humanité. C'est une illustration cinématographique radicale de la fameuse loi de Murphy, ou loi de l'emmerdement maximum.
Les survivants, abasourdis par l'acharnement des scénaristes.
Doté
d'un budget, à l'époque colossal, aujourd'hui risible, de 16
millions de dollars, Virus
fut
un échec commercial lui aussi apocalyptique. Le film fut à peine
distribué en salle avant d'être vendu directement aux chaînes de
télévision dans une version passée à la hache et incompréhensible de 108 minutes,
alors que l'original dure 2h36. Il est aujourd'hui tombé dans le
domaine public, ce qui nous permet, chers lecteurs de vous proposer ci-dessous cet atypique chef d'oeuvre en version intégrale. A regarder seul ou en
famille, confortablement confinés.
Egalement sur The Internet archive.org
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