Pour accompagner la France en vacance, les idiots vous proposent une petite série estivale qui célèbre les choses simples de la vie que nous aimons tant : l’apéritif, le farniente, l’amitié, la médisance des soirs d’été, la moiteur des peaux brûlées, la beauté des noyades salvatrices, l’étalement des corps obèses, etc.
« On se surprend parfois à regretter que le mot plage ne noie pas…
Il ne mouille même pas. Ce qui était touchant, ce matin-là, c’était la bonne volonté des fréquentants à faire là où on leur disait de faire, c’est-à-dire à croire là où on leur disait de croire. Ici, trois centimètres de sable étaient une plage. Là, des bouts de torchon bleu étaient des oriflammes claquant au vent. Quelques transats et quelques parasols plantés dans le bitume de la voie sur berge recouverte de galets de Dieppe étaient généralement reconnus en tant que transats, parasols et galets de Dieppe. Et ces plumeaux en pots à intervalles réguliers se voyaient sans difficulté attribuer le nom de palmiers. Il y avait aussi des brumisateurs qui dispensaient des gouttes d’eau. On était exactement dans le programme des bateleurs de la Mairie de Paris : « En journée, plages de sable fin ou de gazon, ateliers de nœuds marins, location de vélos, initiations à la pêche et à la pétanque, mur d’escalade. En soirée, spectacles de rue, guinguette, concerts, performances, scène techno. » Et, bien entendu, il n’y avait rien d’autre de balnéaire que ce qui était écrit dans ce programme. Le balnéaire n’était pas ailleurs que sur le papier. Le littoral ne se résumait qu’à ce littéral. Mais l’important n’était pas là. L’important résidait dans l’air de béatitude de ceux et de celles qui ne cessaient d’affluer. Je ne voudrais pas avoir l’air exagérément désagréable, mais je crois me souvenir qu’il existe un film de propagande qui s’intitule Hitler offre une ville aux Juifs. Les médias aux ordres, dès le lendemain de l’inauguration du concept Paris-Plage, ont battu des mains et sauté en l’air, et leurs discours auraient pu très bien se condenser en cette bonne nouvelle : Delanoë offre une plage aux touristes… » Philippe Muray
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