Joseph
Scipilliti est né à Messine, en Italie,
le 25 décembre 1951. Sa carrière d'avocat à débuté en
Seine-et-Marne au début des années 1990. C'est à peu près au
même moment qu'il a entamé un journal, achevé le 29 octobre 2015,
avant de se suicider, après avoir tiré trois
balles sur le bâtonnier Henrique Vannier, qui devait lui signifier
une interdiction d'exercer pendant trois ans. Joseph Scipilliti était
l'avocat de Christine Tasin, de Riposte Laïque et Résistance
Républicaine. Nous publions aujourd'hui une réflexion sur ce
suicide envoyée par un contributeur extérieur que nous remercions
d'avoir bien voulu nous confier son texte.
Afin de compléter l'article, le
« Journal indélicat » que Joseph Scipilliti souhaitait
largement faire circuler est disponible en pdf en cliquant sur le
lien suivant :
http://static.resistancerepublicaine.eu/wp-content/uploads/2015/10/Journal-ind%C3%A9licat-Enregistr%C3%A9-automatiquement.pdf
MON
JOURNAL INDELICAT
L’avocat
qui s’est suicidé ne l’a pas fait sur l’autel de
Notre Dame, mais après avoir tiré trois fois sur son bâtonnier de
Seine-et- Marne, pas à la tête ni au cœur, la balle à la tête
il se l’était réservée pour lui-même. La garde des
sceaux a
été aussitôt bouleversée, même apparemment plus
qu’un président de la République après un accident de car,
bouleversée par les balles tirées sur un bâtonnier, et
elles auraient pu être tirées sur un juge, que dis-je sur un
procureur.
L’avocat
suicidé était né à Messine, et son père modeste - qui avait eu
une fois dans sa vie à se louer de l’Assistance judiciaire au
civil - ce qui fait, entre autres choses, que
le fils a été longtemps socialiste, c’est-à-dire, comme on
disait, de gauche. Nul n’est parfait, mon père et mon
grand-père paternel l’étaient. Ce fils de milieu
modeste - ne pas confondre avec milieux
défavorisés, comme on dit - a donc fait de l’assistance
judiciaire volontaire, au pénal, quoiqu’il n’aurait
pas voulu être pénaliste (le banditisme ne l’intéresse pas),
parce que pour être bon défenseur au civil il faut avoir une
culture, qui si elle ne va pas jusqu’à lire de la littérature ou
de la non-fiction autre que juridique, peut utilement aller jusqu’à
connaître la pratique au pénal.
Ayant
constaté lucidement lors de ses études que les étudiants de
toutes les autres facs prenaient ceux sortis de la sienne pour les
moins capables de raisonnements autres que bornés, il n’a pas
moins conservé la dignité du pauvre, le sens de la déontologie
d’un métier, la même qui fait que j’ai pu m’étonner,
faisant passer l’oral du baccalauréat dans des temps très
anciens où cela avait un enjeu, d’être abordé devant Janson de
Sailly par un parent d’élève qui voulait m’acheter : de
même s’étonne-t-il de ce qu’un ancien ami potache agent
d’assurance ne lui propose un dîner en ville que pour lui
suggérer au dessert de lui communiquer, contre un pourcentage, la
liste de ses clients. Or les indélicatesses - du titre -
sont celles reprochées à un avocat pauvre qui ne se soumet pas aux
abus de pouvoir systémiques de la hiérarchie de l’Ordre,
des greffières syndiquées, des juges non professionnels
des tribunaux de commerce, de la magistrature salariée telle
que sortie de l’école de Bordeaux.
Pas
les indélicatesses - simple homonymie - des conflits
d’intérêts d’un bâtonnier prescripteur de contrats
de fournitures, impunément, dans son département. Mea
culpa, il fut un temps où j’étais maître après Dieu dans
ma classe, comme le bâtonnier, et mon pouvoir absolu, que je
croyais nécessaire pour exercer mon office sans contrainte
perverse, je ne peux plus jurer en confession ne pas l’avoir
exercé, pas à bon escient, en sorte qu’un ancien élève n’en
ait gardé un souvenir d’injustice. Ce temps n’est plus.
L’injustice, aujourd’hui, serait de ne pas accorder de pouvoir
conserver ses notes positives pour repasser le bac, cinq ans. Ou,
idéalement, mais vécu, de ne pas accorder une licence à une
étudiante fantôme qui argumente qu’étant en fin de droits faute
d’avoir ses peaux d’âne qu’une secrétaire ne peut lui
accorder faute de ma signature sans un faux, j’aurai
sur la conscience qu’elle ne sera plus logée en cité
universitaire. Comme le suggère l’avocat
suicidé, il ne serait pas mal que le bâtonnier, le magistrat,
soient soumis, non à cette pression démocratique, mais à un état
de droit et à un vrai recours indépendant de leur profession (le
recours existant : efficacité 0, 05 °/°) au lieu
des pressions, efficaces quand des autoroutes sont
coupées la nuit par des gens du voyage, et des machines à laver
lancées sur les têtes de policiers qui sont entrés dans un
territoire des Cités qui n’est pas le leur, selon
l’interprétation de l’ordre public par le préfet. Car,
argumenterait-il, cette pression démocratique, comme le disait
Clémenceau qu’il cite en épigraphe, est le droit pour les poux
de ronger le lion. Sauf si le vrai lion a un pied-à -terre, en
gated community, son refuge dans les Caraïbes. Reste, en
Europe, pour se consoler, qu’on puisse encore entendre
traiter l’avocat époux de Carla Bruni-Tedeschi, la
Rollex des femmes dit-il, de minable jaloux, si on pense que la
vérité sort de la bouche pas seulement des impubères, mais, par
procuration, du plus lion cavaliere Berlusconi.
Il
est vrai que dans des temps plus récents, de massification des
professions, le nombre des avocats (de même qu’il y
avait dix profs d’histoire à Paris avant 1830, et 40 000 en
France aujourd’hui) fait que la notion de profession
libérale, quand on ne s’est pas reconverti au salariat, a pour
sens la pauvreté, pour la majorité, comme pour les
architectes, les médecins ceux qui voudraient bien
échapper au tiers payant et à la grille inférieure des
honoraires, les très petites entreprises concurrencées à mort par
celles qui ont la taille pour employer impunément massivement des
ressortissants de pays à la main d’œuvre moins chère, les
professeurs qui voudraient échapper aux concours de la fonction
publique, de l’enseignement sous contrat, des affectations en
zones prioritaires aux milieux défavorisés et aux crachats aux
profs par un auxiliariat ou un régime d’entrepreneur individuel,
les curés, même blancs, ceux qui n’ont ni l’entregent
ni l’aura au sortir du Séminaire pour être programmés
évêques.
La
pauvreté n’est pas tout, même si comme le médecin
des pauvres qu’était Céline un avocat peut être cause de sa
pauvreté quand il ne fait pas payer ses honoraires à des
associations qu’il juge utiles à la société, comme celle qui,
aujourd’hui, sans doute par une obligation morale en retour,
publie son testament, demeuré une heure sur Google avant d’être
promptement retiré, d’y être remplacé par les habituels chiens
de garde, Libération, Figaro, Le Monde etc.. qui
pointent aussitôt - feu sur les
dissidents ! - l’association indélicate, et
hop, réductio ad hitlerum qu’ils
n’hésitent toujours pas à exercer à l’égard d’une
minorité du peuple français qui approche d’être la majorité.
La pauvreté n’est pas tout. Ce qui conduit au suicide,
c’est de croire tragiquement à l’état de droit, quand la
structure de péché fait qu’il n’y a partout que le règne des
loups en bande : le bâtonnier en est généralement
et, encore plus généralement, « mon bâtonnier »
(citation médiatisée d’un avocat de Seine et Marne issu de la
Diversité, aussitôt interviewé en renfort ) est le chef local
d’un consensus solidaire de la religion républicaine et laïque,
dont ne sont exclus que ceux, judiciables victimes, politiques,
policiers, affichés sur les tableaux d’infamie d’un syndicat de
la magistrature. Comme le prétend ce consensus, et le
premier ministre lors des séances de question à l’Assemblée
nationale - lieu où l’immunité est encore individuelle, pas
comme à Strasbourg -, ce serait attenter à l’état de
droit et à la séparation des pouvoirs que de prétendre dans cette
enceinte qu’il y a des magistrats, ou des bâtonniers,
psychopathes ou pervers. Circulez, il n’y a rien à voir. Faites
enlever le corps. Comme celui sur l’autel de Notre Dame ? Ce
n’était qu’un déséquilibré.
Pour
ce qui est du règne des loups en bande, des fictions plus
éclairantes que le testament du suicidé ? Ces
deux dernières semaines, sorties de deux films. Lobster,
ou comment être ou ne pas être en règle, pas à la chinoise ne
pas dépasser un enfant naturel ou deux, mais l’Avenir radieux des
couples vérifié, par
consentement mutuel pour tout, exigible pour
le permis de circuler en ville, sinon
déportation médico-légale. Sicario, ou
comment à Ciudad Juarez la bien nommée les humains
écorchés suspendus aux lanternes affichent le pouvoir
des loups. Que si on veut pénétrer sur leur territoire, ce n’est
pas de recevoir des machines à laver sur la tête qu’on risque,
mais de devoir être volontaire pour une opération off-limites
(légales, s’entend, les limites ont dû « être
reculées »), en commando en voitures blindées. Il ne s’agit
pas du Nigeria ou du Mali, ou de Raqqa, mais de l’autre côté de
la frontière, vue imprenable depuis El Paso, Texas.
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