«
On dirait que dans les portraits qu’ils tracent de leur
contemporains il s’attachent à nous montrer la manière dont
s’incarne, se prolonge et s’individualise le péché d’origine.
» Emil Cioran
La série de portraits imaginaires se poursuit, dans laquelle on
reconnaîtra selon l'humeur un trait de caractère, un vice, un personnage imaginaire ou réel, ou les deux à la
fois. Aujourd'hui: Mar-Edouard Narbe.
Moins
figure littéraire que portrait warholien, le symbole d'une époque
préférant l'auto-proclamation au jugement et le spectacle à la
rigueur de la chose littéraire, il est si peu profond qu'une phrase
suffirait à définir ce qu'il appelle son sacerdoce d'écrivain
: « ce n'est pas une œuvre c'est une pose ! ». Il
aime le jazz, c'est certain, parce que c'est son goût mais peut-être
plus encore parce qu'il n'est pas meilleur style où briller quand on
est vulgaire et que la technique, même foisonnante, même
merveilleuse, n'y atteint jamais la dimension martiale qu'on rencontre
dans la grande musique ou dans le rock extrême, qui s'y expose quant
à lui jusqu'au ridicule. C'est la possibilité offerte de prouver sa
virtuosité sans en assumer les conséquences et prononcer pour
quelques élus des paroles savantes inutiles à entendre. Quoique
virtuose il ne le soit pas et, Céline à la petite semaine, l'encre
de son oralité tâche ses pages de merde, de pisse et de sperme
stérile, bref, d'excréments seulement ; il transforme,
alchimiste inutile, en boue la boue...
Hormis Céline, avec lequel
il partage sa substance d'escroc, il se réclame d'autres maîtres
tels que Bloy, Nietzsche ou Rimbaud, ce qui ne laisse d'étonner un
regard probe, car en face de Bloy ses vociférations semblent
pleurnicheries de gamin, seul le Rimbaud des Accroupissements
évoque éventuellement une parenté au rabais, et jamais celui des
Illuminations ni celui des enfers allant le soleil et la mer
pour y découvrir l'éternité ; Quant à Nietzsche, que déjà les
fards lourds de Wagner épuisaient, ce n'est guère présumer de son
dégoût facile que de s'imaginer l’interdiction qui le saisirait
face à pareil héritier. Mais Nabe les désire ses aïeux, moins
selon les lois mystérieuses de la descendance artistique que parce
que cela fait bien et que dire, pour vanter son inspiration
: « Nietzsche, Rimbaud et bloy », oblige ses
lecteurs à rasséréner leur critique devant cette lignée
majestueuse.
Évidemment
d'eux il ne garde que les clichés et c'est dans le nauséabond qu'il
veut les égaler, mais il demeure trop malin pour se livrer aux
affres de la lubie (à l’instar de ses anciens camarades en tête
desquels Alain Soral qui lui reproche au final d'être moins con que
lui et d'avoir réussi là où il a échoué) sans la caricaturer
elle aussi dans la pose. Ainsi, son antisémitisme annoncé à
brûle-pourpoint sert de cache-sexe à l'impéritie d'un style qu'il
ne possède pas et qu'il confond avec le jeux de mot trivial. Fin
comme un moderne, il jette en pleine lumière l'infâme, aveugle ses
adversaires et dissimule dans l'ombre sa vraie nature, celle d'un
mauvais écrivain à la langue vulgaire, à la syntaxe inaboutie,
celle d'un écrivain contemporain....
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