L'inquiétude gagne les Français, à l'heure du déconfinement, le Gouvernement n'a rien dit à propos de son bouffon qui court après tous les micros pour ânonner la petite musique du coronavirus et accessoirement, très accessoirement, vendre ses livres, lutter contre le cancer, vendre ses livres, témoigner de son intelligence, vendre ses livres, etc. Et, naturellement, faire la leçon de morale du haut de son immense fatuité. J'ai nommé Axel Kahn. Le monsieur étant manifestement en surchauffe médiatique, nous proposons au Gouvernement de procéder à un déconfinement en quatre étapes : 1/ pour atterrir en douceur, le médecin de 77 ans pourra faire une dernière tournée dans les EHPAD 2/ il recevra les plus hautes distinctions de la République pour service rendu à la bêtise ambiante 3/ il sera installé dans une pièce à miroirs dans laquelle il pourra se mirer toute la sainte journée 4/ il sera oublié, définitivement.
Pour souligner la hauteur de vue de l'excellent personnage, nous rappelons que, déjà en 2013, Axel Kahn étalait sa bêtise avec une rare complaisance au sujet de ces Français incapables de progrès. Décidément.
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« Alors
moi je trouve que les gens ne font pas d’efforts ! », « les gens
ne voient pas plus loin que le bout de leur nez, moi si j’étais à leur place je… »,
« les gens ne s’intéressent à rien », « les gens sont vraiment trop cons,
moi je… », « décidément les gens ne comprennent rien à rien. »
Des
phrases comme celles-ci, on a l’habitude d’en entendre à tous les mariages, à
toutes les réunions de famille, à tous les pots de départ ou de fin d’année ou les
repas de Noël, à chaque fois, en somme, que les incidences de la vie familiale
ou de la vie professionnelle nous mettent en contact avec un de ces insupportables
donneurs de leçons que l’existence semble avoir doté d’un ego surdimensionné et
d’une suffisance à la mesure de cette vilaine excroissance. Souvent, il s’agit
d’un individu d’âge mûr s’estimant « arrivé » dans la vie par les
moyens les plus nobles et les voies les plus respectables, caractéristique qui
l’autorise à pontifier interminablement sur le manque de courage des jeunes d’aujourd’hui,
sur le manque de lucidité de ses contemporains, sur le manque d’intelligence et
d’initiative de ses pairs, bref sur tout ce qui peut lui permettre de mettre en
valeur sa propre réussite et sa propre intelligence. Peu d’écrivains ont su
avec autant de justesse que Henry David Thoreau, intimer le silence à ces terribles
vieillards auxquels les années n’ont même pas pu enseigner les vertus de l’humilité :
L’âge n’est pas mieux qualifié, à peine
l’est-il autant, pour donner des leçons, que la jeunesse, car il n’a pas autant
profité qu’il a perdu. On peut à la rigueur se demander si l’homme le plus sage
a appris quelque chose de réelle valeur au cours de sa vie. Pratiquement les
vieux n’ont pas de conseil important à donner aux jeunes, tant a été partiale
leur propre expérience, tant leur existence a été une triste erreur, pour de
particulier motifs, suivant ce qu’ils doivent croire (…).
Bien
sûr on dira que la sagesse des aînés est précieuse mais les années qui s’accumulent
apprennent finalement que cette sagesse est toujours trop lointaine pour ne pas
savoir que le silence est d’or. François Mauriac a souffleté cent moralistes en
écrivant simplement que le seul défaut qu’il ne pouvait pardonner chez un homme, c’est d’être content de soi.
Axel
Kahn a toutes les raisons d’être content de lui. C’est un jeune retraité « monté
sur ressort » qui reçoit avec simplicité les
journalistes venus l’interviewer « sur ses terres familiales » en
Champagne. C’est un scientifique renommé, médecin généticien, essayiste,
directeur de recherche à l'INSERM, ancien directeur de l'Institut Cochin, ancien
président de l'université Paris Descartes, bref, c’est un homme comblé qui
parle de politique en rigolant et en bichonnant ses juments sur ses terres de bord
de Seine. Axel Kahn a toutes les raisons de faire profiter le monde de sa
sagesse.
Ainsi,
quand le jeune retraité dynamique s’est lassé de murmurer à l’oreille des
juments sur les terres de ses ancêtres, il a pris son bâton de pèlerin pour
partir à pied à la rencontre des Français, dans un périple qui l’a conduit de
la frontière belge à la frontière espagnole, le
« penseur-marcheur » qui s’avère donc être le membre le plus endurant
du quarteron de philosophes à la retraite constitué par lui et ses pairs :
Jean-Christophe Ruffin, Jean-Paul Kauffmann et Jean Lassale.
La « longue
marche » d’Axel Kahn l’a mené à la découverte des Français, un peu comme
Edouard Balladur avait découvert le métro en 1993. Ce n’est pas parce que l’on
est tout en haut de l’échelle qu’il ne faut pas, de temps à autre, jeter un
coup d'oeil en contrebas. Des Ardennes au pays basque, Axel Kahn a donc « chaque
soir rencontré ses fans, publié sur son blog, échangé sur les réseaux sociaux,
et créé l’événement dans la presse locale » mais il a surtout alimenté sa
réflexion sur l’état du pays en rencontrant les agriculteurs qui tiennent les
chambre d’hôtes dans lesquelles il a fait halte au cours de son voyage, les
commerçants, les bistrotiers, les artisans, bref, le peuple, humble, modeste
et, si l’on en croit Axel Kahn, complètement arriéré.
Des
gens
qu’il a rencontrés au cours de son périple, Axel Kahn a retenu un
certain nombre
de traits qu’il condense en un portrait synthétique : « cela
correspond à cette France qui considère que le monde tel qu’il va n’est
que
menaces, et que ça n’ira qu’en s’aggravant demain. Les valeurs
auxquelles ces
gens étaient attachés sont dénoncées, comme la chasse par exemple, ils
sont de
moins en moins maîtres de leur avenir qui se décide à Bruxelles, et
pensent que
leurs enfants le seront encore moins. » Des inquiets, donc, des
rétrogrades et des passéistes, des perdants que l’on observe un peu
comme les espèces en voie de
disparition derrière les grilles des zoos, des idiots bornés qui,
évidemment,
votent beaucoup pour le Front National, éprouvent un sentiment de
crainte
vulgaire en entendant parler des émeutes de Trappes, qui critiquent
l’euro et l’Europe
et qui ne sont même pas fichus de se tenir au courant pour recevoir
comme il se
doit la sommité qui leur fait l’honneur de leur rendre visite :
Un jour, il pleuvait sur le chemin de
halage du canal de la Marne au Rhin. Frigorifié, je m’arrête dans le seul
bistrot de marinier. L’Union de Reims avait fait ses cinq colonnes à la une sur
moi. Le tenancier m’accueille et me demande qui je suis, où je vais, et je me
rends compte qu’il ne regardait de la presse locale que ce qui l’intéressait,
rien du reste, alors qu’il avait un journal sous les yeux.
Eberlué,
Axel Kahn, savant, généticien, chimiste, ancien directeur d’université et
peut-être un jour, qui sait, directeur de cabinet, découvre que tous ces reclus ne
lisent pas régulièrement le journal et se préoccupent surtout de leurs soucis
quotidiens, c’est tout bonnement incroyable. « Je me suis rendu compte que
cette population était uniquement centrée sur sa quotidienneté. C’est une
réaction un peu autistique », conclut, un peu dépité, le bon professeur
Kahn. Heureusement que ces sauvages ont le bon goût de ne pas élever le ton :
« ils ne vocifèrent pas, mais s’éloignent de la rationalité et de la
modernité. » Qu’ils restent polis, c’est la moindre des choses.
Mais Axel
Kahn n’est pas là seulement pour tracer avec subtilité le portrait
psychologique de cette France de l’envers qu’il découvre avec l’émerveillement
du docteur Livingstone parcourant la vallée du Zambèze en 1860. Il fait aussi œuvre
de géographe, classant les régions qu’il a parcourues dans différentes
catégories, « région sinistrée », « région rurale désertifiée »,
« région rurale en renouveau », « région proche d’un bassin d’emploi »… C’est
beau comme une mission ministérielle et on attend avec impatience le manuel de
géographie qui va suivre, d’autant qu’Axel Kahn livre au journaliste qui l’interroge
quelques fulgurances : « A contrario, les pays qui n’ont jamais été
industrialisés ont échappé à la crise industrielle. » Si son prochain
brûlot, L’homme, le libéralisme et le bien commun, est du même
tonneau, les émules de Ronald Reagan et les tristes séides du FMI peuvent
commencer à trembler…
"Dr. Kahn, i presume?"
Heureusement
pour Axel Kahn, cette traversée déprimante de la France arriérée, raciste,
sinistrée et qui ne lit pas les journaux n’a pas pu entamer le moral ou les
convictions de cet incorruptible qui avoue avoir su rester
suffisamment insensible à tous les paysages et terroirs traversés pour puiser
en lui-même la matière de sa réflexion sur l’état du pays. Voilà qui est tout à fait louable et comme le confie, admiratif, le
journaliste de Rue89 : « Il y a des gens chez qui la marche
bouscule les certitudes. Il n’en fait pas partie. »
C’est
bien. Rien donc, en 2160 kilomètres, n’a pu faire que cet humaniste moderne,
cet aristocrate de la pensée, ne se départisse de la condescendance qui
imprègne chacune des lignes de l’entretien accordé à Rue89. Aucune
rencontre, aucune conversation ne lui auront fait quitter son Olympe, elles
l’auront, comme c’est le cas chez tous ces inénarrables donneurs de leçons, conforté dans la certitude de
sa supériorité.
Il est très incorrect de parler au nom de ceux qui ne vous ont
rien demandé, cependant je voudrais faire ici une exception et faire savoir à M. Kahn,
qui ne lira sans doute jamais ceci, qu’au nom de tous les ploucs et les bouseux
qui n’ont pas la chance de songer à briguer la mairie du Ve, au nom de tous
ceux qui ont occupé leur enfance de pécores à parcourir mille fois en vélo les rues
désertes de leur bled merdique, au nom des pézoufs qui ne lisent pas le
journal, tes convictions et ta condescendance Axel, tu peux te les rouler en
cône et te les insérer là où le soleil ne brille jamais.
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