lundi 5 novembre 2012

Le régime du Parti Unique


Les élections américaines s’achèveront dans quelques jours et diront qui, de Barack Obama ou Mitt Romney, présidera la destinée de ce qui reste la plus puissante nation du monde. Nous avons décidés d’accompagner le déroulement du dernier acte en publiant quelques avis tirés des blogs et médias américains et de proposer en parallèle quelques commentaires.



L’indécision est-elle la marque du déclin ? Les dernières élections présidentielles françaises ont presque fait figure de non-évènement tant le rejet des deux candidats était fort parmi les électeurs. A l’issue du scrutin, les grands vainqueurs étaient Marine Le Pen et le taux d’abstention. François Hollande remportait une victoire à l’arrachée sur un Nicolas Sarkozy usé par cinq années d’une hyperprésidence impuissante. La moitié de son électorat l’a porté au pouvoir plus par antisarkozysme que par réelle conviction. Le nouveau président du "changement" n’a d'ailleurs pas manqué de remercier tous ces électeurs indécis en défendant depuis bientôt six mois une politique qui se résume à trois grands principes : hausse des taxes, mesures sociétales et complaisance à l’égard du communautarisme. L’exercice du pouvoir se réduit donc désormais à gérer son noyau dur électoral plutôt qu’à diriger le pays, le seul levier d’action politique qui est systématiquement actionné étant la pressurisation fiscale des classes moyennes. Tout cela n’a rien d’une surprise. Le dernier grand règne politique s’est achevé avec Mitterrand qui a installé le clientélisme au cœur des pratiques politiques plus sûrement encore que les Médicis à Florence. Après lui, se sont succédé les rois fainéants ou les trublions. L’indécision des électeurs ne fait que répondre à l’indifférence de l’Etat gestionnaire.



Dans Taki’s Magazine, un blogger américain et lui-même électeur remarque que cette indécision des électeurs est motivée aux Etats-Unis par l’incapacité des électeurs à distinguer les composantes politiques de ce qui ne forme plus qu’un « One-Party state ». Extraits :

« Dans les démocraties modernes anglo-américaines, une élection sur dix seulement offre un choix entre des politiques véritablement contrastées. Je n’ai jamais été en mesure de voter lors de telles élections. La dernière élection présidentielle nous a offert, comme je l’ai regretté sur le moment, le choix entre « l’impérialisme moralisateur de John McCain [et] le sentimentalisme providentialiste de Barack Obama. » En l’occurrence, Obama s'est avéré ne pas vouloir donner autant de notre substance nationale aux étrangers comme je le craignais. Sage impérialiste moralisateur, il en a donné aux néocons pour leur argent – je veux dire, vous savez, notre argent.
J’ai voté pour McCain malgré tout en 2008 comme la moins pire des deux options. Avec le recul, je doute que la victoire de McCain ait pu faire une aussi grande différence que je le supposais alors. Face aux grands thèmes de la politique nationale – guerre, énergie, chômage, immigration, multiculturalisme, impôts – les deux candidats de 2008 semblaient majoritairement avoir des réponses identiques. […] En 2004, lors de la première élection présidentielle à laquelle j’ai participé (je n’ai obtenu la citoyenneté qu’en 2002), je m’accrochais toujours à l’illusion que Georges W. Bush était animé de réelles convictions conservatrices. L’incompétence flagrante de John Kerry renforça cette illusion.
Bien avant cela, le seul scrutin national auquel j’ai participé furent les élections britanniques de 1970, quand le Parti Conservateur (un nom qui signifie à peu de choses près : Bureaucratisme Managérial) obtint une victoire surprise face au Labour (un nom qui signifie à peu de choses près : Bureaucratisme Managérial). J’avais voté travailliste. J’ai oublié pourquoi.
J’ai par la suite raté les élections les plus déterminantes des 40 dernières années, n’ayant pas le droit de vote lors de Reagan vs. Carter en 1980, hors du pays au cours de Thatcher vs. Callaghan en 1979. Je n’étais également pas dans mon pays en 2001, 1997, 1992, 1987, 1983 et 1974. Bien sûr, il est toujours possible de voter par procuration ou voie postale mais je ne me suis jamais suffisamment préoccupé de politique pour m’en soucier.
Hormis en ces occasions exceptionnelles, la politique de l’Anglosphère moderne s’est installé dans une sorte de régime de parti unique. Nous ne nous voyons pas offrir des choix, mais seulement de subtiles nuances politiques.
Ayant observé les évènements politiques des dix dernières années à la fois dans mon pays d’origine et mon pays d’adoption, je trouve difficile de me convaincre que les politiciens ait pu être en quelques occasions réellement efficaces. L’impression donnée est celle d’un grand rouleau compresseur que ses conducteurs manœuvrent avec peine ; ou d’électeurs errant d’est en ouest et d’ouest en est, sur le pont d’un navire en train de couler. […]
Il n’y a pas de politique. Il n’y a pas de choix. Le puissant vaisseau de la destinée nationale vogue à toute vapeur vers les récifs pendant que les citoyens errent sur le pont, d’est en ouest, d’ouest en est, prisonniers de l'illusion d'être utiles. 

Je ne pense pas que j’irai voter en novembre. »

John Derbyshire. « The one-party state ». Taki’s Magazine. 18 octobre 2012
Traduit par un Idiot.


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