Dans
sa conférence de presse, François Hollande a rappelé à
plusieurs reprises sur un ton menaçant qu’il « ne laisserait pas
faire » les sceptiques qui osent critiquer le projet européen, et qui
envisagent même la sortie de l’euro. Que faut-il entendre par ces mots qui relèvent davantage de la police de la pensée que du débat démocratique ? Une nouvelle mise en garde contre les dissidents de tous bords ? Et quelques phrases plus loin, le président de préciser la stratégie
adoptée pour les futures élections européennes : criminaliser les opposants en les faisant passer, au mieux, pour
d’infâmes réactionnaires et, au pire, pour d’affreux fascistes. Son diagnostic
est sans ambiguïtés : non, il n’existe pas en Europe de vague populiste,
mais seulement un « vieux courant raciste et extrémiste » dont il
faut empêcher l’expression. Les eurosceptiques sont donc en voie d’être rayés
de la carte de la bien-pensance selon la technique désormais bien huilée du
lynchage médiatique.
Outre cette petite saillie sur les
répressions à venir, la conférence de presse de notre cher président a reçu,
une nouvelle fois, l’absolution de tous les médias. Quel courage, en effet, que
de renoncer à ses convictions (censées être socialistes) et à une bonne partie du programme pour lequel il a été élu
par le peuple français (si cela a encore un sens) pour s’adonner, le doigt sur
la couture du pantalon, aux remèdes envisagés par la troïka européenne et défendus
par tous les économistes patentés du système ! Est-il seulement besoin de
préciser que ces recettes néo-libérales sont non seulement celles qui ont
précipité le monde dans la crise, mais aussi celles qui ont plongé les Etats
européens dans des déficits absolument impossibles à rembourser ? La seule
vertu de ces politiques d’austérité étant de maintenir à flot le marché (auprès
de qui les Etats s’approvisionnent), ce qui a effectivement provoqué des
résultats « miraculeux » au vu des profits que se partagent
aujourd’hui les grands instituts financiers. Les peuples essorés, pressurés et
vidés apprécieront…
Ce
nouveau programme présidentiel est d’autant plus génial qu’il revient à défaire, à peu de choses près, tout ce qui a
été entrepris depuis 18 mois ! Observons, au passage, la simplicité
confondante d’une science économique qui se résout dans l’alternative
imparable : soit la relance par l’offre, soit la relance par la demande.
Les deux options étant censées ramener la sacro-sainte croissance. Là encore,
il suffit de rappeler le diagnostic émis par le club de Rome (en
1972 !) et justement intitulé « Les limites de la croissance ».
Ce rapport n’a d’ailleurs jamais fait l’objet de vraies contradictions tant son
constat était limpide : si une majorité de pays adoptent les standards de
la vie occidentale, il faudrait cinq ou six planètes pour assurer
l’approvisionnement en ressources naturelles, sans compter les dégâts
écologiques qui en découleraient. En même temps, me direz-vous, le rapport
datait de 1972 et les Cassandre auraient encore péché par excès de pessimisme.
Sauf que le dit rapport portait sur les soixante années à venir et que sa
réactualisation en 2012 n’a pas modifié une seule ligne de son constat implacable.
Il conclut de la façon suivante :
« Tout se déroule comme prévu pour que survienne le
désastre ».
Alors, on peut toujours jongler avec
des chiffres totalement délirants : 30 milliards offerts aux entreprises
sur le dos des allocations familiales (acquis obtenu par le Conseil national de
la résistance), 50 milliards (!) de réduction des budgets de l’Etat (on croit
rêver, surtout de la part d’un parti qui a toujours pris soin de soigner sa
clientèle électorale), quelques milliards récupérés du côté de la réduction du nombre de
régions (alors même que la réforme des conseillers territoriaux est à peine
engagée) et quelques autres du côté des crédits compétitivité-entreprises qui viennent d’être votés.
Enfin, c’est le grand jeu des milliards qui va se faire d’un coup de baguette magique
dans l’euphorie générale de la liberté d’entreprendre enfin retrouvée. Le Nobel de l'économie, Paul Krugman, ne s'y est pas trompé et a déclaré : "Oui, des conservateurs sans coeurs et butés ont mené la politique, mais ce sont des politiciens de la gauche modérée, mous et brouillons qui les ont encouragés et leur ont facilité la tâche".
En tous les cas, la majorité des médias
ont applaudi des deux mains ce programme incroyable fait de reniements,
d’approximations et de génuflexions devant la marche insensée du monde. En avant ! Que la
machine tourne à plein régime, après nous le déluge. Sans compter que la romance présidentielle a fait un bel écran de fumée derrière lequel se sont engouffrés tous les journalistes à la petite semaine, contribuant ainsi à recouvrir le cadavre de la gauche d'un linceul de paillettes festives...
On regarde ce spectacle grandiose avec une petite larme à l’œil car l’on sait que ce type de politique relève beaucoup plus du monde imaginaire de Tolkien (sauce Madoff) que de la réalité grise et âpre de la mondialisation « heureuse ».
On regarde ce spectacle grandiose avec une petite larme à l’œil car l’on sait que ce type de politique relève beaucoup plus du monde imaginaire de Tolkien (sauce Madoff) que de la réalité grise et âpre de la mondialisation « heureuse ».
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