Tout d’abord, commençons par un
message d’espoir à l’adresse de tous les usagers franciliens des RER et autres
trains de banlieue : la dernière campagne de prévention de la SNCF
s’achèvera le 15 octobre. Il est difficile de prévoir cependant les flambées de
violence et lynchages spontanés qui pourraient survenir dans les gares avant
cette date libératrice. Car, pour sa dernière campagne, la SNCF a décidé de
frapper fort. Après la RATP qui a eu recours cet été à l’anthropomorphisme pour
prévenir les incivilités (oh comme il a l’air bête l’âne qui bloque les portes,
oh comme elle a l’air sotte la grenouille qui saute les tourniquets…) la SNCF
va plus loin encore dans la régression en imposant tous les quarts d’heure dans
les gares des messages dans lesquels des voix d’enfants font la leçon aux usagers
dont le système nerveux déjà dangereusement fragilisé n’avait pas besoin de
cela pour s’effondrer complètement. Depuis le 6 septembre, les sermons qui sont
égrenés avec une malice évidente par de sales petits morveux de cinq à neuf ans
trop heureux visiblement de pouvoir rappeler à l’ordre leurs infortunés
géniteurs ressemblent à peu près à cela : « Eh vous les
adultes ! Vous n’êtes pas au courant ? C’est interdit de traverser
les voies ! et tous les zours ya des crans qui traversent les
voies ! » Ce niveau d’excellence dans le domaine de la torture
psychologique laisserait presque supposer que la SNCF a eu recours aux services
d’anciens du FSB ou de barbouzes de la CIA pour ôter au travailleur pendulaire
le dernier semblant de dignité et d’humanité auquel il pouvait se raccrocher.
Il est douteux qu’à l’écoute de ce genre d’annonce, l’abruti qui a décidé de
tirer le signal d’alarme pour sécher la première heure de cours où les
dégénérés qui ont décidé qu’il était bien plus pratique de traverser la voie
par troupeaux de dix se jettent soudain à genoux en versant des larmes amères,
réalisant soudain l’étendue dramatique de leur incivisme. Il est plus probable,
et peut-être souhaitable, qu’une troupe de citoyens harassés et déterminés
réduisent en miettes tous les haut-parleurs de la gare du nord après avoir
entendu une fois de trop l’horripilant babillage des affreux petits flics.
Cette campagne de prévention aura au moins un mérite, c’est de faire réaliser,
quand par exemple s’offre au regard du voyageur fatigué le riant paysage qui
cerne Garges-Sarcelles et que retentit une fois de plus (une fois de
trop ?) dans le RER le sermon zézayant, l’effrayante schizophrénie qui
s’est emparée des pouvoirs et des entreprises publiques dont les campagnes de
communication paraissent aussi décalées et à côté de la plaque qu’Edouard
Balladur dans le métro. Ce n’est plus seulement comique, c’est insane.
----------------------------------------------
Article publié sur Causeur et Hipstagazine
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire