Nos
intellectuels médiatiques ont depuis longtemps dépassé les bornes de
l’indécence. Ils voguent haut dans l’éther du mensonge, de l’hypocrisie totale,
de la bassesse la plus crasse. On ne compte plus leurs prises de position
tonitruantes qui se sont avérées au mieux fausses, au pire criminelles. Si on
passait au crible leurs multiples interventions médiatiques sur tel ou tel
sujet de la politique mondiale, on serait effaré par le taux élevé d’inepties
qu’ils profèrent jour après jour, dans l’impunité totale. Ce sont pourtant les
mêmes qui chantent aux universitaires, dans les pages de ces grands quotidiens
devenus leur tribune matinale, la nécessité de l’évaluation, les bienfaits de
l’excellence… Qu’ils commencent par examiner leurs propres dires approximatifs
et superficiels, avant de donner des leçons. Le comble est qu’ils pensent, ce
faisant, s’opposer au pouvoir, aux puissants, alors qu’ils leur servent
quotidiennement la soupe…
Ces intellectuels ne sont plus les voix serviles du
totalitarisme, comme dans les années 1930, mais celles du marché et du
spectacle, du grand barnum des ombres, des fantômes, des zombies. Reste que
leur aplomb dans la diffusion de contre-vérités demeure total. Ils ne défendent
plus un parti au prix des pires bassesses, mais leur train de vie ou leur cote
de popularité. Ils ne s’allient plus avec le Talon de fer de London, mais avec
le village global dont ils exploitent la crédulité planétaire et le flux tendu
d’informations sans fondement. Pour un énième passage à la télévision, ils
seraient prêts à tordre les faits, à trahir une amitié, à écraser ceux qu’ils
nomment les médiocres, à savoir ceux qui n’estiment pas la vie bonne aux seuls
critères quantitatifs de la réussite sociale.
Mais le fond du problème reste le même : le goût
du pouvoir, de la renommée, de la carrière se substitue à la quête de la
vérité, à l’éthique de la vocation-profession pour parler comme Weber. Ces
intellectuels dévoyés ne sont plus complices de régimes criminels, mais d’un
système d’exploitation de l’opinion, d’une marchandisation de la culture, d’une
dégradation objective du goût et de l’originalité. Ils sont les produits
standardisés de la Kulturindustrie des Idées, des théories, des thèses, le
recyclage commercial de vieilles lunes, l’un avec le matérialisme antique à la
sauce nietzschéenne, l’autre avec le kantisme juridique, le troisième avec
l’antitotalitarisme tendance Eden Rock. Ce ne sont ni plus ni moins que des
marques commerciales, avec leur logo simpliste, leur pseudo-valeur ajoutée.
Chacun occupe tranquillement un secteur du marché de la pensée, sans se faire
concurrence. À toi la défense des droits de l’homme, à toi l’exaltation de la
passion, à moi la critique de la technique ; et tous sont unis dans les
renvois d’ascenseur, les critiques dithyrambiques, les coups de fils complices.
Bruce Bégout, Entretien
avec Article 11, décembre 2009.
http://www.article11.info/?Bruce-Begout-Les-exemples-de-l
Publié sur : http://anarchrisme.blog.free.fr/index.php?/page/4
quel est l 'auteur de cette illustration ?
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